Vraiment plus rien à se mettre sous la semelle en ce moment, même le Mardi Gras est mort, ne reste plus qu'à revisiter les archives et les souvenirs.
17 février 1991, trente ans après que le camarade soviétique Yuri Gagarine soit devenu le premier homme à voler dans l'Espace, six illuminés qui eux aussi planaient pas mal créent le « Marathon de l'Espace » entre la ville de Kourou et son Centre Spatial, poumon économique de la Guyane française. Pour éviter le flop complet, l'inscription est gratuite tellement on trouve peu de joggeurs sous ces latitudes équinoxiales écrasées de chaleur où se balancer au fond d'un hamac est presque le sport national et tellement on y trouve encore moins de coureurs entraînés potentiellement capables d'affronter les 42 km 195 sous un soleil assassin. Contre toute attente l'expérience fonctionne et la mise à feu est réussie avec 42 individuels qui se lanceront sur la distance olympique (29 termineront l'épreuve, un fonctionnaire des Impôts tropicalisé l'emporte en 2h47' devant deux Légionnaires en 2h53' et 3h03') et 42 équipes qui bouclent le marathon-relais à cinq coureurs sur le même parcours. 42 individuels + 42 équipes pour un 42 kilomètres inédit dans la ville spatiale et à quelques jours du 42ème lancement de la fusée ARIANE, belle coïncidence, comme un signe du ciel et des dieux de l'Olympe ! L'affaire était mise en orbite et visiblement sur de bonnes bases puisque 30 autres années plus tard, le Marathon de l'Espace existe toujours et est devenu aujourd'hui le plus important rassemblement sportif du département (hors Carnaval) mais aussi l'un des plus anciens marathons français encore en activité (sa 30e édition déjà reportée de 2020 à 2021 va encore devoir attendre un an de plus pour souffler les 30 bougies en 2022).
17 février 1991, au moment de la remise des prix très improvisée de cette première édition, aucun des six illuminés ne veut prendre le micro et c'est ainsi qu'il échouera dans les mains du couillon qui se trouvait le plus mal placé près de l'ampli... De gauche à droite : Piquemal (2h37' au marathon, une vie de bénévole au service de l'athlétisme, actuel président du Toucan Athletic Club de Kourou, club organisateur), Clausse (2h52' au marathon, l'homme à la casquette qui porte deux montres au poignet à l'entraînement et qui ventile comme une locomotive, réincarnation locale d'Emil Zatopek), Gilquin (envolé trop vite au paradis des coureurs à pied en 1996), Jaouen (2h42' au marathon, aujourd'hui exilé en Bretagne, terre de bagne comme la Guyane), Yvanez (9h17' sur 100 km tropical en 1997, record de Guyane qui a tenu 12 ans) et Anthouard (2h42' au marathon, redoutable triathlète passé par l'Ironman de Hawaï et émigré dans le grand nord américain). Ah purée d'igname, qu'est-ce qu'on s'est bien marrés !
Merci à Jean-Benoît Jaouen pour ce texte historique.